samedi 27 décembre 2014

Le leader du Hamas en Turquie est bien connu des services de répression américains


IPT News
19 décembre 2014

Traduction française : Johan Bourlard

Cette année a été chargée pour la direction du Hamas en ce qui concerne les projets de morts et de destructions. Comme nous l’avons observé jeudi, le Hamas possède trois bases opérationnelles stratégiques en trois lieux distincts – Gaza, le Qatar et la Turquie.

Le centre turc semble être le plus actif dans la préparation d’attentats terroristes, avec pour conséquence, l’arrivée sur le devant de la scène de l’homme qui dirige cette base, Saleh Al-Arouri, connu pour être lié à une série de complots terroristes et d’attentats visant surtout des cibles en Cisjordanie, une zone dans laquelle le groupe terroriste espère regagner en force et popularité.


Comme le montre un nouveau reportage réalisé sur lui par l’Investigative Project on Terrorism, Al-Arouri n’est tristement célèbre que depuis relativement peu de temps mais il se signale depuis de nombreuses années par les efforts qu’il déploie pour aider le Hamas dans son entreprise terroriste, des efforts d’ailleurs bien connus des services policiers et judiciaires américains.

Depuis longtemps, Al-Arouri est un responsable militaire du Hamas qui agit ouvertement en Turquie, pays membre de l’OTAN et allié ostensible des États-Unis et de l’Occident.

Il fut le premier responsable du Hamas à reconnaître la responsabilité du groupe dans l’enlèvement et l’assassinat, en juin dernier, de trois adolescents juifs en Israël.

Naftali Fraenkel, l’un des trois ados assassinés, était un citoyen américain. Selon le United States Code, titre 18, section 2332, le gouvernement américain est habilité à diligenter des enquêtes et à engager des poursuites concernant tout assassinat ou tentative d’assassinat de ses ressortissants commis à l’étranger. Cette base légale permet au FBI et à d’autres agences fédérales américaines d’enquêter sur de nombreux attentats terroristes commis à l’étranger contre des citoyens américains et au ministère américain de la Justice d’engager des poursuites pénales à l’encontre des auteurs de tels attentats.

La loi américaine permet aux victimes d’attentats terroristes commis à l’étranger de poursuivre les responsables. Les États parrainant le terrorisme et officiellement désignés comme tels par le gouvernement américain peuvent également être tenus pour civilement responsables d’actes terroristes contre les États-Unis. La Turquie, bien évidemment, n’est pas reconnue comme l’un de ces États.

En août, Nitsana Darshan-Leitner, fondateur et directeur de l’ONG israélienne Shurat HaDin, un centre de droit, a écrit une lettre au ministre américain de la Justice, Eric Holder, pour demander que le gouvernement américain organise une enquête ainsi que la poursuite et l’extradition d’Al-Arouri depuis la Turquie pour des charges liées à l’assassinat de Fraenkel.

Avec une action légale comme celle-là, ce n’est pas la première fois que le nom d’Al-Arouri apparaîtrait dans un procès devant la cour fédérale. En 2003, trois agents du Hamas avaient été mis en examen à Chicago pour complot et racket. Il s’agissait du dirigeant politique du Hamas, Mousa Abu Marzook, ainsi que de Muhammad Salah et Abdelhaleem Ashqar, résidant tous deux à Chicago. Marzook, alors en Syrie, n’avait jamais été poursuivi. Par contre Salah et Ashqar avaient finalement été condamnés à des peines de prison pour entrave et atteinte à la justice.

Dans cette affaire, Al-Arouri avait été cité parmi les « complices du Hamas » dans un acte d’accusation. Cet acte décrivait Al-Arouri comme un haut dirigeant militaire du Hamas qui avait déjà, au début des années 1990, un rôle de dirigeant d’une cellule d’étudiants du Hamas à l’Université de Hébron. Il avait reçu de la part de Salah « des dizaines de milliers de dollars pour développer des activités en lien avec le Hamas » et qui avaient été utilisés pour l’achat d’armes destinées à commettre des attentats terroristes.

Al-Arouri apparaît en outre dans un arrêt de la cour fédérale américaine de 1999 concernant une action en confiscation civile intentée contre Muhammad Salah. L’arrêt de la cour faisait état d’un voyage effectué par Salah en 1992 en Israël et dans les territoires palestiniens où il avait « transféré environ 100.000 dollars à un agent supposé du Hamas, Salah Al-Arouri qui, aux dires à la fois de Salah et d’Al-Arouri lui-même, avait l’habitude d’acheter des armes. Al-Arouri aurait admis à des responsables israéliens avoir donné, en septembre 1992, à un individu nommé Musa Dudin une partie – environ 45.000 dollars – de l’argent qu’il avait reçu de Salah pour permettre à Dudin d’acheter des armes. Al-Arouri a également rapporté que Dudin avait acquis comme prévu ces armes qui avaient ensuite été utilisées dans des attentats terroristes, notamment un attentat suicide qui avait provoqué, en octobre 1992, la mort d’un soldat israélien à Hébron. »

Comme l’observe l’arrêt de la cour, cela faisait partie d’une série d’attentats terroristes « perpétrés avec des armes et de l’argent fournis par Al-Arouri grâce aux fonds qu’il avait reçus de Salah », avec pour conséquence la déportation de 415 agents du Hamas au Liban en décembre 1992.

Comme on l’a dit, Al-Arouri agit ouvertement en Turquie. La première déclaration reconnaissant la responsabilité du Hamas dans l’enlèvement de Fraenkel et de deux autres étudiants, est arrivée en août au cours d’une réunion de religieux musulmans. Sur cette base, selon des responsables israéliens, Al-Arouri a également ourdi un coup d’État contre le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Si Al-Arouri réussissait, cela menacerait gravement la sécurité nationale des États-Unis dans la région.

La loi répressive américaine donne le pouvoir d’enquêter sur Al-Arouri à propos du meurtre de Fraenkel, l’adolescent américain. L’incapacité à le faire lui permet de poursuivre ses complots incessants en vue de tuer des gens en Israël et, peut-être, ses ennemis palestiniens.

Le rapport complet sur Al-Arouri peut être consulté ici.

mercredi 24 décembre 2014

Gaza, Turquie, Qatar : les trois pôles internationaux du Hamas


Par Yaakov Lappin
Special to IPT News
18 décembre 2014

Traduction française : Johan Bourlard

Ces dernières années, l’organisation terroriste palestinienne Hamas s’est muée en véritable organisme international disposant à l’heure actuelle de trois bases territoriales opérationnelles, à savoir Gaza où siège le Hamas, la Turquie et le Qatar.

Selon les services de renseignement israéliens, chaque base poursuit ses propres objectifs. Au gré des activités terroristes diverses qu’elles mènent, les trois bases ont opéré tour à tour en harmonie et en désaccord, de concert et séparément.

Selon une source proche des services de sécurité, les structures de commandement du Hamas de chaque base « ne constituent pas un même leadership ».

« Le Qatar abrite la branche politique du Hamas, dirigée par Khaled Meshaal. En Turquie [dans la ville d’Istanbul] siège la branche militaire du Hamas qui y met sur pied une infrastructure terroriste. Cette branche se compose en partie d’anciens prisonniers du Hamas expulsés d’Israël lors de l’échange de prisonniers effectué [en 2011] pour récupérer Gilad Shalit. Gaza abrite quant à elle les deux types d’agents, politiques et militaires. »

Les trois branches, dont chacune joue un rôle particulier, connaissent des relations fluctuantes.

Le siège du Hamas à Istanbul est dirigé par Salah Al-Arouri, une figure de proue de l’aile militaire qui se consacre au rajeunissement des cellules terroristes du Hamas en Cisjordanie avant de les utiliser comme tremplin pour la préparation d’attentats meurtriers contre Israël.

Gaza abrite la principale aile militaire du Hamas, les Brigades Ezzedine al-Qassam, dont les agents se consacrent au développement de leur puissance de frappe constituée de roquettes et des réseaux de tunnels. À l’instar d’Al-Arouri, ils cherchent également à créer des cellules terroristes en Cisjordanie.

Jeudi, le Hamas a organisé ce qu’il appelle son plus important exercice militaire depuis la guerre contre Israël de l’été dernier.

Gaza abrite également l’aile politique du Hamas, dirigée par Ismaïl Haniyeh.

Selon la source déjà citée, « ils ont tous leurs intérêts propres. Ceux de Gaza ont leur point de vue et ceux de l’étranger en ont un autre. Par le passé, il y a eu des désaccords. »

À titre d’exemple, citons le différend qui a opposé, l’été dernier, Khaled Meshaal au Hamas de Gaza concernant le moment où se terminerait la guerre contre Israël. Meshaal incitait le Hamas à poursuivre le combat malgré les appels de plus en plus nombreux lancés par le Hamas de Gaza en faveur d’un cessez-le-feu. Les antagonismes résultaient en partie du critère géographique : alors que le Hamas à Gaza pouvait évaluer en temps réel l’ampleur des dommages que lui infligeait Israël durant les combats, Meshaal, confortablement installé dans une banlieue chic du Qatar, pouvait se payer le luxe d’appeler à la poursuite de la lutte.

Malgré ces divergences, il existe une base commune de coopération et d’accord entre les trois branches. Ainsi Saleh Al-Arouri, basé en Turquie, ne se serait jamais lancé dans des missions aussi importantes que la mise sur pied d’un réseau terroriste du Hamas à grande échelle en Cisjordanie, la planification d’atrocités contre Israël ou encore la tentative de renversement de l’Autorité palestinienne et de son président, Mahmoud Abbas, sans le consentement de Khaled Meshaal et du Hamas de Gaza.

La coopération n’est certes pas toujours étroite mais elle existe.

« Il y a des connexions » selon la source proche des services de sécurité. « Le Hamas à Gaza est relié à ceux qui essaient d’organiser le terrorisme en Judée et en Samarie. Il existe un cercle de coopération. »

Al-Arouri peut rechercher l’aide de Gaza et l’obtenir, comme il l’a déjà fait, mais il peut également travailler de façon indépendante. « Il n’y a pas de règle », souligne la source en question.

Ces derniers mois, le Shin Bet [l’Agence de sécurité israélienne] a déjoué deux complots d’attentats terroristes tramés par le Hamas en vue d’infliger à Israël un maximum de pertes et dans le but d’affaiblir le Fatah en Cisjordanie. Les deux complots étaient liés à Al-Arouri.

Cette découverte a conduit les chefs de la défense israélienne à hausser le ton par rapport à la base du Hamas située en Turquie.

Au début de ce mois, le ministre israélien de la Défense, Moshe Ya’alon, a déclaré à son homologue espagnol : « Les quartiers généraux terroristes du Hamas sont à Gaza et à Istanbul. C’est incroyable qu’un pays membre de l’OTAN héberge sur son territoire le siège d’une organisation terroriste ».

« Nous avons empêché un coup d’État projeté par le Hamas et préparé, entre autres, au sein des quartiers généraux turcs, contre [le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas] Abou Mazen en Judée et en Samarie. Nous l’avons sauvé de cette révolution. Il est donc très important, pour notre liberté, d’agir sur le plan de la sécurité en Judée et en Samarie », a déclaré Ya’alon.

De la même manière, fin novembre, le Shin Bet et l’armée israélienne ont annoncé qu’ils avaient démantelé une infrastructure terroriste du Hamas d’envergure internationale en pleine préparation de multiples attentats très meurtriers, notamment un attentat à la bombe visant un stade de football à Jérusalem.

Le complot prévoyait des attentats à la voiture piégée, des attentats à la bombe sur le réseau de trams à Jérusalem et des attaques ciblant des Israéliens à l’étranger.

Cette affaire illustre la position de plus en plus centrale occupée par Istanbul dans les activités terroristes du Hamas en Cisjordanie. Le siège du Hamas en Turquie est devenu un centre de commandement et de planification de premier plan.

Au début de cette année, le Shin Bet a annoncé le démantèlement d’un autre vaste réseau du Hamas en Cisjordanie mis sur pied par Saleh Al-Arouri à Istanbul et dirigé à Ramallah par un membre local du Hamas.

Selon une enquête israélienne, le Hamas a écoulé plus d’un million de shekels [plus de 250.000 dollars] au profit d’agents terroristes pour la préparation d’une série d’attentats destinés à détourner l’attention de Gaza et finalement conduire à la chute de l’Autorité palestinienne dirigée par le Fatah. Ce projet aurait dû se réaliser en incitant Israël à mener une riposte sévère en Cisjordanie, en déstabilisant la région et en conduisant au renversement de l’Autorité palestinienne.

Le Hamas a parcouru un long chemin depuis l’époque où ses fondateurs, des agents des Frères Musulmans établis dans les territoires palestiniens, ont créé des centres d’endoctrinement et d’aide sociale.

À présent, le Hamas est devenu une organisation terroriste internationale qui continue à tramer de nouveaux complots en vue d’assassiner et de mutiler les Israéliens à partir de ses différentes bases alors qu’il rêve de créer un second régime islamiste et djihadiste en Cisjordanie, comme il l’a fait à Gaza.

Yaakov Lappin est correspondant au Jerusalem Post pour les affaires militaires et de sécurité nationale. Il est l’auteur de The Virtual Caliphate (Potomac Books), un ouvrage qui explique l’établissement d’un État islamiste virtuel par les djihadistes agissant sur internet.

vendredi 19 décembre 2014

Attentats terroristes en Australie et bientôt près de chez vous


Par Steven Emerson
IPT News
15 décembre 2014

Traduction française : Johan Bourlard

L’épilogue violent de la prise d’otage terroriste en Australie était inévitable. Le terroriste Man Haron Monis a été tué lors de la prise d’assaut du café par l’équipe d’intervention de la police de Sydney. Deux otages ont également été tués mais la police de Sydney n’avait pas d’autre choix que d’agir. Après un siège de près de 17 heures, la police avait de bonnes raisons de croire que le « cheikh » autoproclamé Haron Monis allait mettre à exécution sa menace de faire exploser les bombes qu’il disait avoir, même si ses demandes étaient satisfaites.

Pratiquement durant tout ce temps, un contact a été maintenu entre un négociateur de la police et le terroriste preneur d’otages. Mais alors que 10 personnes étaient toujours retenues, on craignait que le terroriste se transforme en kamikaze et tue toutes les personnes présentes dans le café. À présent, la police de Sydney cherche à reconstituer le fil des événements mais ce qui est certain, c’est qu’elle a sauvé la vie d’un certain nombre d’otages.

En dépit des affirmations ridicules de certains commentateurs disant que les « motivations » de l’auteur ne sont pas connues, on ne devrait pas douter du fait qu’il s’agit bel et bien d’un acte terroriste islamiste. On va pourtant nous servir toutes sortes « d’explications » nous disant que, comme le montre son casier judiciaire chargé de plusieurs condamnations pour agression sexuelle et meurtre, il ne s’agissait pas vraiment d’un terroriste islamiste mais plutôt d’une personne à l’équilibre mental fragile. On pourrait toutefois en dire autant de tous les terroristes. Après tout, comment quelqu’un de sensé pourrait-il vouloir tuer des civils innocents en raison de leurs croyances ?

C’est pourtant ce que font les terroristes islamistes. Et le fait de nier leur motivation islamiste radicale – comme l’a fait le gouvernement américain à plusieurs reprises en refusant de désigner comme tels certains attentats terroristes islamistes notamment le massacre perpétré par le major Nidal Hassan – est le meilleur moyen de voir de tels actes se reproduire, particulièrement de la part de ces terroristes décrits comme des loups solitaires. La police australienne est en train d’enquêter pour savoir si Monis agissait seul ou de concert avec d’autres extrémistes islamistes, voire sur ordre de l’EIIL.

Le mois dernier, Monis a renié sa foi chiite pour faire allégeance à l’EIIL dans un message posté en ligne et retiré depuis. Notre organisation, l’Investigative Project on Terrorism, a retrouvé la page en question et l’a traduite. Voici ce que Monis écrivait :

« Serment d’allégeance du Cheikh Haron [à l’EIIL] »

« Allégeance à Allah, à Son Messager et au Commandeur des Croyants – Je fais serment d’allégeance à Allah, à Son Messager et au Calife des Musulmans »

« Louange à Allah et que la prière et la paix soient sur notre Prophète Muhammad, sa famille et tous ses compagnons, ainsi que sur tous ceux qui le suivent. Que la paix soit sur le Commandeur des Croyants, le Calife des Musulmans, l’Imam de notre temps, et que la louange soit à Allah qui nous a donné un Calife sur terre et un imam qui nous appelle à l’Islam et tient fermement le câble d’Allah Tout-Puissant. Louange à Allah grâce à qui j’ai eu l’honneur de faire allégeance à l’Imam de notre temps. Ceux qui font serment d’allégeance au Calife des Musulmans font allégeance à Allah et à Son Messager… »

Son site Internet contient également des harangues contre le gouvernement australien pour son implication en Irak et en Afghanistan.

Le renseignement australien était au courant des agissements de Monis depuis un certain temps et disposait sur lui d’un dossier détaillé sur les activités islamistes radicales qu’il avait eues en Australie et sur la surveillance électronique de ses communications avec des terroristes islamistes à l’étranger.

L’attentat terroriste de Sydney est certainement à mettre en lien avec les appels lancés par les islamistes radicaux à commettre individuellement des attentats terroristes partout en Occident. Ces appels ont pris de l’ampleur avec le magazine Inspire, édité par Al-Qaïda dans la Péninsule arabique (AQPA) que dirigeait Anwar Al-Awlaki jusqu’à ce qu’il se fasse tuer par un drone américain. En appelant les musulmans vivant en Occident à commettre des attentats terroristes isolés, l’EIIL a copié le modèle d’AQPA appelant à commettre des attentats localement n’importe où et n’importe quand. 

Désormais, ces attentats se produisent partout dans le monde et sont particulièrement bien alimentés par Internet et plus encore par les réseaux sociaux qui ont virtuellement transmis le message du terrorisme islamiste à la vitesse de l’éclair. Rien que pour ces deux dernières années, il y a eu en Europe et aux États-Unis plus de 100 tentatives – réussies ou manquées – d’attentats terroristes islamistes inspirés par l’EIIL. Que ce soit la Belgique, la France ou encore Oklahoma City, aucun endroit n’est préservé du terrorisme islamiste, que celui-ci soit le fait de vétérans de l’EIIL rentrés au pays ou simplement de ces musulmans radicalisés vivant en Occident et qui sont incités à perpétrer des attentats.

Par ailleurs, les dirigeants occidentaux commettent une erreur fatale en faisant une distinction entre l’EIIL et d’autres groupes terroristes islamistes tels que le Hamas, le Hezbollah, Boko Haram ou encore Al-Shabaab. Les motivations qui sous-tendent l’action de ces groupes terroristes islamistes sont les mêmes que celles de l’EIIL, à savoir tuer autant d’ennemis infidèles que possible et imposer la suprématie de l’Islam. La seule différence tient au fait que l’EIIL a proclamé sa prétention au califat mondial alors que les autres groupes ont pour ambition d’être des califats régionaux. 

Cependant l’EIIL et les autres groupes ne diffèrent en rien quant à leur programme et leurs méthodes génocidaires. Et si le Hamas n’a pas réussi – contrairement à l’EIIL – à tuer ses ennemis infidèles, c’est uniquement parce qu’Israël a été capable d’empêcher le Hamas de commettre des meurtres de masse, même si ce dernier s’y est employé l’été dernier lorsqu’il a lancé plus de 6000 roquettes et missiles sur Israël dans le but de tuer un maximum de civils. Quant au Nigéria, il n’a pas été en mesure de mettre fin à ces horribles attentats que Boko Haram est parvenu à commettre et dans lesquels plus de 300 Nigérians ont été massacrés, durant la seule année écoulée.

Manifestement ce sont les services de renseignement australiens qui ont pu le mieux gérer la menace interne représentée par les extrémistes musulmans. Pour preuve, les tentatives de complots déjouées avec succès l’année dernière et qui comprenaient notamment des décapitations de civils australiens et des attentats à la bombe contre des cibles australiennes, autant de projets qui se tramaient au sein de réunions d’extrémistes. Le drame d’aujourd’hui montre par contre la difficulté d’empêcher des attentats commis par des loups solitaires.

Ce à quoi nous assistons actuellement n’est pas le réveil de l’islam radical mais seulement un prolongement de ce réveil déclenché par les attentats du 11-Septembre. La différence réside dans le fait que la phase actuelle n’est pas dirigée par des organisations centralisées. Le terrorisme islamiste se développe désormais de façon décentralisée. Cette situation pose de nouveaux défis aux services de renseignement occidentaux et crée une pression extraordinaire pour l’élaboration de nouvelles méthodes de surveillance des menaces internes qui représentent également un défi technique puisqu’il s’agit de contrôler les métadonnées de réseaux sociaux. Cependant, le plus dangereux et le plus contreproductif serait de nier ce que sont ces attentats, à savoir des attentats terroristes islamistes.

Steven Emerson est le directeur exécutif de l’Investigative Project on Terrorism et le producteur exécutif d’un nouveau documentaire sur les Frères Musulmans en Amérique, intitulé « Jihad in America : the Grand Deception » [Le Djihad en Amérique : la grande imposture].

jeudi 18 décembre 2014

Le problème des radicaux de l’État islamique qui ne partent pas et restent parmi nous


Par Abigail Esman
Special to IPT News
9 décembre 2014

Version originale anglaise : ISIS’s Stay-at-Home Radicals
Traduction française: Johan Bourlard

À travers toute l’Europe et l’Amérique, les gouvernements et les services de renseignement s’efforcent de résoudre le problème posé par les musulmans occidentaux qui sont partis rejoindre le djihad en Syrie et sont revenus ensuite au pays. Mais dans le même temps, ils oublient ce qui constitue une menace plus importante encore, à savoir ceux qui ne sont jamais partis.

Les experts du contre-terrorisme s’accordent à dire que le danger représenté par le retour des djihadistes est conséquent : déjà radicalisés avant même de rejoindre des groupements tels que le Front Al-Nosra et l’État islamique (EI ou EIIL), ils sont désormais bien entraînés au combat terroriste. Contrairement à la plupart des Occidentaux, ils ont surmonté les désagréments qu’ils ont pu éprouver par le passé par rapport au fait de commettre un meurtre ou d’affronter la mort. Et il y a grande chance pour qu’ils l’aient déjà fait.

Leur nombre est en outre en augmentation. Ainsi on estime à 3000 le nombre d’Occidentaux à avoir déjà rejoint l’État islamique ou d’autres groupes terroristes similaires. Désormais, de nombreux pays, dont les Pays-Bas et l’Angleterre, ont pris la résolution de confisquer les passeports de tout combattant syrien réputé avoir la double nationalité (de nombreux fils d’immigrés marocains et turcs possèdent un passeport du pays d’origine de leur famille). Des propositions de loi semblables ont été faites aux États-Unis, comme celle déposée par le Républicain Frank Wolf, député de Richmond (Virginie). Le Royaume-Uni a également envisagé la confiscation des passeports de tous les citoyens britanniques qui rejoignent le djihad, mais de telles mesures ont été rejetées au motif qu’elles risqueraient de laisser des individus apatrides.

Toutefois, certains experts – ainsi que des djihadistes revenus du combat – disent désormais que les « cellules dormantes » de l’EIIL sont incrustées en Occident. Le mois dernier, Dimitri Bontinck, appelé le « chasseur de djihadistes », a confié au journal britannique Mail Online que des « sources influentes » l’avaient informé de l’existence de telles cellules, prévenant qu’ils étaient en train de « se préparer à déclencher leur guerre contre l’Europe ». Par ailleurs, un repenti de l’EIIL s’exprimant sur une chaîne de télé scandinave, aurait parlé de cellules dormantes en Suède qui, selon ses dires, seraient en train « d’attendre des ordres ».

La présence de telles cellules ne devrait pas tellement surprendre. Le plus étonnant par contre, c’est que les services de renseignement en Europe ne les ont pas détectées plus tôt. Cela pourrait s’expliquer en partie par le fait qu’on s’est tellement concentré sur le problème des retours que certains services de renseignement et de répression ont été utilisés au maximum de leurs capacités. À titre d’exemple, au mois de juin, le service de renseignement néerlandais (AIVD) a reconnu qu’il « ne pouvait plus suivre » les djihadistes présents aux Pays-Bas. En octobre, ils ont été contraints d’engager des équipes de la police pour les assister, particulièrement dans la surveillance de plus ou moins 40 djihadistes revenus du combat (On estime à 130 le nombre de Néerlandais, revenus du combat ou tués, qui sont allés se battre en Syrie).

Toutefois, si l’AIVD et d’autres services de renseignement peinent à suivre ceux qu’ils connaissent, cette situation fait d’innombrables autres musulmans radicalisés en Europe des proies faciles pour les recruteurs de l’État islamique qui ont déjà retourné à leur avantage les efforts déployés par l’Europe pour empêcher le retour des djihadistes. Au moyen de vidéos en ligne et de médias sociaux utilisés avec une habileté extraordinaire, les agents de l’EI encouragent de plus en plus leurs partisans occidentaux à travailler depuis chez eux : diffuser la parole, encourager les autres à faire le voyage (l’expression utilisée est « faire la Hijra ») ou préparer des attaques contre les infidèles sur le sol occidental.

Et ils ont déjà attaqué, comme ce fut le cas lors de la décapitation du fusilier Lee Rigby dans une rue de Londres en 2013, lors du meurtre d’un soldat canadien, le caporal Nathan Cirillo, à Ottawa le 22 octobre, ainsi que lors de l’attentat à la hachette, à peine deux jours plus tard, dirigé contre des officiers de police dans le quartier newyorkais du Queens. D’autres attaques ont été déjouées, comme le projet de complot de trois Britanniques qui, selon le ministère public, étaient inspirés par les appels de l’EI à commettre des attentats contre des incroyants. Les trois hommes ont été arrêtés à Londres le 6 novembre au motif qu’ils avaient projeté de décapiter des civils.

Mais la propagande de l’EIIL a révélé son efficacité sur un autre plan. Le recrutement pour le djihad est en augmentation aux Pays-Bas, si on en croit un rapport récent de l’AIVD qui observe aussi que « le nombre de djihadistes néerlandais faisant le voyage vers la Syrie pour y participer au conflit a augmenté de façon substantielle depuis fin 2012. » Et le soutien global aux groupes terroristes grandit même plus rapidement encore, comme l’ont démontré les nombreuses manifestations en faveur de l’EIIL l’été dernier. Selon l’AIVD, ce sont « plusieurs milliers » de personnes qui, rien qu’aux Pays-Bas, soutiennent l’EI alors que, selon un autre rapport publié récemment aux Pays-Bas, près de 90 pourcents des jeunes Turcs néerlandais considèrent les membres de l’EI comme des « héros » (depuis lors, ce dernier rapport a essuyé des critiques mais ses auteurs maintiennent leurs conclusions).

En Allemagne, le soutien à l’EIIL a augmenté d’une façon si menaçante qu’en septembre, le gouvernement a fait passer une loi pour l’interdire purement et simplement. D’après un article du New York Times, cette loi prévoit « une interdiction des activités en soutien à l’État islamique en Irak et en Syrie, y compris toute exhibition de son drapeau noir, dans le cadre de la suppression de la propagande et du recrutement organisés par le groupe extrémiste auprès des Allemands. » Le 5 décembre, les autorités ont fait usage de cette loi pour fermer une mosquée à Brême dans laquelle auraient été prononcés des sermons incitant de jeunes musulmans à faire la Hijra – c’est-à-dire à émigrer – pour rejoindre le djihad.

En France, on estime à 700 le nombre de personnes ayant fait la Hijra ; c’est le nombre le plus important en Europe. Selon un sondage ICM réalisé cet été à la demande de l’agence de presse russe Rosslya Segodnya, une personne sur six soutient l’EI. Parmi les 18-24 ans – la classe d’âge la plus importante de la population musulmane du pays – 27 pourcents ont indiqué avoir une « opinion positive » du groupe terroriste.

Il ne s’agit pas là de simples données mathématiques mais bien de personnes, de dizaines de milliers de jeunes, hommes et femmes. En réalité, comme l’observe le Guardian, une analyse faite par des universitaires italiens sur plus de deux millions de messages en arabe postés en ligne, montre que « le soutien à l’État islamique parmi les utilisateurs arabophones des réseaux sociaux en Belgique, en Grande-Bretagne, en France et aux États-Unis est plus important qu’en Syrie et en Irak qui sont pourtant les fiefs de ces groupes militants. »

Pourquoi ?

C’est exactement la question que se pose le maire de Rotterdam Ahmed Aboutaleb, musulman d’origine marocaine. Malgré la fermeté de ce dernier face au radicalisme islamique, le nombre de jeunes qui, à Rotterdam, sont soupçonnés de se radicaliser a augmenté de 50 pourcents en un an. Dans l’attente du procès d’un djihadiste présumé, Aboutaleb, selon le quotidien néerlandais AD, se demandait à voix haute « pourquoi de tels jeunes, éduqués et pleins de promesse, s’engagent dans le djihad. »

Il aurait déclaré : « La question est de savoir qui sont ces gens qui partent et pourquoi ils le font. Parce qu’ils se sentent discriminés ? Parce qu’ils n’ont pas de travail ? Parce qu’ils sont rejetés par la société? Je ne comprends pas ça. Cela pourrait probablement pousser quelqu’un à franchir le pas mais il doit y avoir d’autres éléments qui jouent un rôle. »

En fin de compte, ce sont des questions que tout le monde devrait se poser – à commencer par les agences de renseignement et les services de répression. Car au moment où le nombre de djihadistes occidentaux est en augmentation et que le soutien à l’EI grandit, une chose devient de plus en plus claire, à savoir que tant que nous n’avons pas de réponses à ces questions fondamentales, rien de ce que l’on fera ne comptera.

lundi 15 décembre 2014

Un prince arabe dénonce l’islamisme


par Daniel Pipes
The Washington Times
10 décembre 2014

Version originale anglaise : An Arab Prince Denounces Islamism
Traduction française : Johan Bourlard

Le 5 décembre, dans une allocution remarquable mais jusqu’ici passée inaperçue, Salman bin Hamad Al-Khalifa, le prince héritier du Bahreïn (royaume insulaire du golfe Persique abritant la cinquième flotte de la US Navy), a donné une franche analyse de l’ennemi islamiste et proposé des solutions importantes pour le combattre. 
 
Il a beaucoup à nous apprendre, à nous Occidentaux (en commençant par son malheureux homologue britannique, le prince héritier Charles), si seulement nous voulions écouter. Il est vrai que certains dirigeants occidentaux parlent de confrontation avec l’idéologie islamiste, mais la majorité d’entre eux évite d’utiliser ce terme en recourant aux euphémismes, aux confusions et à la lâcheté. Ce qui est le plus frustrant, ce sont ces dirigeants (comme Tony Blair) au discours fort qui ne sont suivis d’aucun acte.

Le prince Salman, âgé de 45 ans et généralement considéré comme le membre de la famille royale bahreïni le plus ouvert aux réformes, commence par observer l’imprécision de l’expression « guerre au terrorisme ». Le temps est venu, dit-il, « de nous débarrasser » d’un terme qui remonte au 11-Septembre. « Il est quelque peu trompeur et ne représente ni l’intégralité ni la totalité du conflit auquel nous sommes confrontés » mais simplement un « outil » et une tactique.

Dans un anglais parfait, le prince poursuit en replaçant le conflit actuel dans son contexte historique : « Reportons-nous au siècle dernier. À l’époque, nous faisions face à un ennemi bien différent. Nous étions confrontés au communisme et nous y faisions face ensemble. Or quand nous étions confrontés au communisme, nous savions qu’il s’agissait d’une idéologie, ce que le terrorisme n’est pas. »

Il observe également que « nous ne sommes pas seulement en train de combattre des terroristes mais également des théocrates. » Par théocrates, Salman entend des hommes « placés au sommet d’une idéologie religieuse et qui ont le pouvoir, par décret religieux, de priver quelqu’un… de leur au-delà – et d’utiliser [le pouvoir religieux] à des fins politiques. » Ce sont également des tyrans, des isolationnistes et des misogynes qu’il faudra combattre « pendant longtemps. » Il les rejette comme des êtres « beaucoup plus proches du XVIIe siècle » et qui n’ont « pas de place dans notre XXIe siècle moderne ». Il nous prie instamment de « supprimer de notre vocabulaire l’expression “guerre au terrorisme” pour nous concentrer sur la menace réelle que constitue l’essor de ces théocraties néfastes » ; à cette fin, il propose de remplacer l’expression « guerre au terrorisme » par sa propre formulation : « guerre aux théocrates ». Il espère que ce concept permettra de « faire converger les programmes militaires, sociaux et politiques – voire économiques – dans une approche globale destinée à contrer ce phénomène comme nous l’avons fait avec le communisme. » Dans la partie peut-être la plus marquante de son discours, il déclare : « C’est l’idéologie en soi qui doit être combattue. Elle doit être nommée, flétrie, endiguée et finalement vaincue. »

Jusque-là, c’est parfait. Toutefois, Salman évite d’aborder cette dure réalité, à savoir que l’idéologie « tordue » et « barbare » qu’il décrit n’est autre qu’islamique et que les théocrates sont tous des musulmans : « cette guerre dans laquelle nous sommes engagés ne peut se faire contre l’islam,… le christianisme,… le judaïsme,… le bouddhisme. » Ainsi, au moment de donner un nom à cette idéologie, Salman hésite et généralise. Il utilise un néologisme inepte (« théo-crism ») avant de rappeler la Seconde Guerre mondiale et la « théocratie fasciste ». Il rejette implicitement « l’islamisme », disant qu’il ne veut pas un « débat au sujet de certains partis politiques pour savoir s’ils sont ou non islamistes. »

Pour ma part, je maintiens que l’islamisme est précisément le terme qu’il cherche pour nommer l’idéologie ennemie et que la guerre dans laquelle nous sommes engagés est bien une « guerre à l’islamisme. » Salman comprend très bien le problème – la transformation de l’islam en une idéologie totalitaire. Mais il se réfugie derrière le prétexte selon lequel le christianisme, le judaïsme et le bouddhisme partageraient tous cette même tare. Et cela au lieu de reconnaître – lui et d’autres musulmans sincères – la réalité inéluctable à savoir que l’islam seul possède une propension au totalitarisme.

Sur le plan positif, les observations de Salman s’inscrivent dans une tendance de plus en plus forte parmi les dirigeants politiques musulmans, qui consiste à affronter directement le danger de l’islamisme. Deux exemples récents illustrent cette tendance :

·      Rupture importante sur le plan des idées, le gouvernement voisin des Émirats Arabes Unis a classé dans sa liste de groupements terroristes le Council on American-Islamic Relations (CAIR) et plusieurs autres organismes non-violents en raison de l’engagement de tous ces groupes dans l’incitation, le financement et d’autres activités favorisant le terrorisme.

·      Le gouvernement égyptien a lancé via Interpol un mandat d’arrêt à l’encontre de Yousouf Al-Qaradawi (88 ans), le leader spirituel immensément influent des Frères Musulmans, pour « incitation et aide à commettre un homicide volontaire, à faire s’échapper des prisonniers, à perpétrer des incendies, des actes de vandalisme et de vol. »

Cette nouvelle tendance est d’une importance majeure. Comme je le dis souvent, l’islam radical est le problème et l’islam modéré est la solution. Désormais, on peut ajouter un autre dirigeant influent, en l’occurrence un prince héritier, à la liste des musulmans désireux de trouver une solution.