2
mai 2014
Le batteur des Scorpions, en route pour
Bahreïn où il devait se produire avec son groupe à l’occasion du Grand Prix de
F1, était en transit à l’aéroport de Dubaï lorsque, après avoir interpellé des
voyageurs, il s’est fait arrêter et emprisonner pour insulte à l’islam.
C’est le quotidien de Dubaï Gulf News qui l’annonce dans un article publié en ligne le 29 avril. Ce jour-là,
le tribunal pénal de Dubaï venait de condamner le batteur allemand James Kottak
à un mois de prison pour avoir injurié des musulmans, avoir eu des gestes
indécents et avoir laissé tomber son pantalon alors qu’il se trouvait en état
d’ivresse !
Selon le témoignage de deux membres du
personnel de l’aéroport, James Kottak aurait manifesté bruyamment son refus de
voyager avec des passagers afghans et pakistanais tout en se couvrant le nez pour
ne pas respirer leur odeur, avant d’adresser des insultes à l’encontre de la
compagnie aérienne dubaïote, de l’aéroport et des musulmans.
Même s’il reconnaît avoir bu cinq verres
de vin dans l’avion le conduisant de Moscou à Bahreïn et transitant par Dubaï,
James Kottak nie les autres accusations portées contre lui par les deux membres
du personnel qui disent avoir été témoins de l’incident. Lors de l’audience de
mardi, il a d’ailleurs plaidé non-coupable, affirmant que la police l’avait
arrêté uniquement parce qu’il avait bu du vin.
Réactions
sans appel, quoique…
Vu de l’Occident, une peine d’un mois de
prison pour insulte pourrait paraître sévère mais vu de Dubaï, c’est une
perception diamétralement opposée qui domine. Le journal déplore en effet la clémence
du jugement, tout comme les lecteurs dubaïotes qui ont réagi à l’article. Parmi
les différentes réactions on notera la condamnation de l’attitude du batteur
allemand et l’éloge de l’action de la police mais aussi la formulation de
suggestions telles que l’intransigeance totale face au manque de respect pour
la loi et la religion du pays ou encore l’interdiction de consommation d’alcool
sur tous les vols en provenance ou en direction du Moyen-Orient.
Je nuance tout de suite ce que je viens
de dire. Il y a effectivement un lecteur, le seul, à avoir relativisé
l’attitude de James Kottak tout en déplorant les propos péremptoires des autres
lecteurs qui comme lui n’ont pas été témoins de la scène ni été parties au
procès. Ce lecteur, qui écrit comme les autres de Dubaï, est aussi le seul à
porter un nom à consonance non pas arabe mais anglaise…
Cet événement et les réactions auxquelles
il a donné lieu donnent matière à réflexion plus particulièrement sur deux
questions : d’une part la consommation d’alcool en pays musulman et d’autre
part le respect dû à l’islam et aux musulmans dans leurs pays.
L’alcool
en pays musulman
La consommation de vin et de toute
boisson alcoolisée, banale en Occident, demeure un acte condamnable dans les
pays de culture islamique où le Coran et la Sunna (qui rapporte les paroles,
faits et gestes de Mahomet) constituent toujours une référence légale
fondamentale. Ainsi, selon le Coran (5 : 90), le vin fait partie des
« œuvres de Satan » (min camal
al-shaytan) et est donc à proscrire. La Sunna généralise cette interdiction
à toute substance enivrante, même en quantité infime.
Notons toutefois qu’il existe dans
l’islam sunnite un courant juridique, le hanafisme, qui autorise la
consommation de boissons faiblement alcoolisées. Ce courant est celui qui
domine notamment en Turquie connue d’ailleurs pour son fameux raki, eau-de-vie
à base de raisin et aromatisée à l’anis.
Le
respect dû à l’islam
L’autre question posée par l’arrestation
de James Kottak concerne le manque de respect dont un non-musulman fait preuve
envers un musulman en raison de sa religion, et qui plus est dans un pays
musulman. En terre d’islam, ce genre d’attitude constitue sans aucun doute une
offense majeure, en vertu de la charia, la loi islamique qui se fonde sur le texte
coranique et sur la Sunna.
Le Coran recommande aux musulmans de ne
pas avoir de relations avec ceux qui tournent la religion en dérision, car une
telle attitude est totalement réprouvée par Allah :
- « Lorsque vous entendez qu’on renie les versets d’Allâh et qu’on s’en raille, ne vous asseyez point avec ceux-là jusqu’à ce qu’ils entreprennent une autre conversation. Sinon, vous serez comme eux. Allâh rassemblera, certes, les hypocrites et les mécréants, tous, dans l’Enfer. » (4 : 140)
- « Ô les croyants ! N’adoptez pas pour alliés [awliyâ’] ceux qui prennent en raillerie et jeu votre religion parmi ceux [juifs et chrétiens] à qui le Livre fut donné avant vous et parmi les mécréants. Et craignez Allâh si vous êtes croyants. » (5 : 57)
- « Laisse ceux qui prennent leur religion pour jeu et amusement, et qui sont séduits par la vie sur terre. […] Ceux-là se sont abandonnés à leur perdition à cause de ce qu’ils ont acquis. Leur breuvage sera l’eau bouillante et ils auront un châtiment douloureux pour avoir mécru. » (6 : 70)
Quant à la Sunna, la condamnation est
encore plus explicite puisqu’on y trouve un récit – hadith rapporté par les deux plus grands compilateurs de la Sunna
que sont Bukhârî (livre 56, chap. 98/4) et Muslim (livre 32, chap. 39)
– récit selon lequel Mahomet aurait maudit ceux qui se moquaient de lui et le
critiquaient, avant de les massacrer et de jeter leurs cadavres dans un puits !
À la lumière des prescriptions de la loi
islamique, on peut conclure que le tribunal de Dubaï, en prononçant contre le
batteur allemand une peine d’un mois d’emprisonnement, a effectivement fait
preuve d’une grande clémence.
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