vendredi 25 octobre 2013

Russie musulmane ?

Ma traduction de l'article de Daniel Pipes, publié le 21 octobre 2013.

Le 10 octobre dernier, un Russe, Yegor Chtcherbakov, âgé de 25 ans, a été poignardé à mort apparemment par un musulman originaire d'Azerbaïdjan. Ce meurtre a provoqué à Moscou des émeutes anti-immigrés, des actes de vandalisme, des agressions ainsi que l'arrestation de 1200 personnes, révélant ainsi les tensions majeures qui agitent la société russe.

(Lire la suite)

dimanche 29 septembre 2013

Les réfugiés et leurs pays d'accueil



par Daniel Pipes
The Washington Times
24 septembre 2013

Version originale anglaise : Let Refugees Remain in Their Own Culture Zones
Traduction française : Johan Bourlard


L’accalmie que connaît la crise des armes chimiques nous offre l’occasion de nous pencher sur le flot impressionnant de réfugiés quittant la Syrie et de reconsidérer quelques opinions malencontreuses à propos de leur avenir.

Environ dix pour cent des 22 millions d’habitants que compte la Syrie ont fui le pays, la plupart vers les États voisins – le Liban, la Jordanie et la Turquie – dont les gouvernements, incapables d’y faire face, limitent le passage aux frontières, une attitude qui a suscité des inquiétudes au sujet de la situation désespérée de la Syrie. Le haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés, António Guterres, suggère (d’après le Guardian qui le cite) que son agence « cherche à installer des dizaines de milliers de réfugiés syriens dans des pays qui soient plus en mesure de les accueillir », rappelant par là le programme de réinstallation d’après 2003 qui a permis à 100.000 Irakiens de s’établir en Occident. D’autres aussi se tournent instinctivement vers l’Occident pour trouver une solution. À titre d’exemple, la Conférence des évêques catholiques des États-Unis a appelé les États occidentaux « à faire davantage » pour les réfugiés syriens.

----------
Des réfugiés syriens à l’aéroport de Beyrouth, en partance pour l’Allemagne.
----------

L’appel a été entendu : le Canada a proposé d’accueillir 1300 réfugiés syriens et les États-Unis 2000. L’Italie a recueilli 4600 réfugiés syriens arrivés par bateaux. L’Allemagne a proposé d’en accueillir 5000 (dont une partie est déjà arrivée). La Suède a offert l’asile aux 15.000 Syriens déjà présents dans le pays. Des groupes d’habitants se préparent à un afflux massif dans tout l’Occident.

Toutefois ces chiffres sont bien en-deçà d’une population qui se compte en millions. Par conséquent, l’Occident ne peut à lui seul résoudre le problème des réfugiés syriens. En outre beaucoup dans les pays occidentaux (particulièrement dans des pays européens comme les Pays-Bas et la Suisse) sont lassés d’accueillir des musulmans qui ne s’assimilent pas et qui, au contraire, cherchent à remplacer les mœurs occidentales par la loi islamique, la charia. La chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre britannique David Cameron considèrent tous deux ce multiculturalisme qui prône l’égalité de toutes les civilisations, comme un échec. Pire, on assiste à l’émergence de mouvements fascistes comme l’Aube dorée en Grèce.

Et il est probable que beaucoup plus de réfugiés musulmans soient sur le même chemin. En plus des Syriens, il faut ajouter des Bangladais, des Pakistanais, des Afghans, des Iraniens, des Irakiens, des Libanais, des Palestiniens, des Égyptiens, des Somaliens et des Algériens. Les ressortissants d’autres pays comme le Yémen et la Tunisie pourraient bientôt les rejoindre.

Heureusement il existe une solution.

Pour installer les Syriens dans « dans des pays qui soient plus en mesure de les accueillir », comme le dit avec délicatesse Guterres, il suffit de détourner le regard de l’Occident à majorité chrétienne vers les vastes étendues inoccupées du royaume fabuleusement riche d’Arabie saoudite ainsi que vers des États plus petits mais parfois encore plus riches comme le Koweït, Bahreïn, le Qatar et les Émirats arabes unis. Pour commencer, ces pays (que je regroupe sous le nom d’Arabie) sont bien plus adaptés pour le rapatriement vers la Syrie que des pays comme par exemple la Nouvelle-Zélande. Vivre là signifie aussi ne pas devoir endurer des climats rigoureux (comme en Suède) ni apprendre des langues difficiles et peu parlées comme le danois.

Aussi et surtout, les musulmans d’Arabie partagent des liens religieux profonds avec leurs frères et sœurs syriens. Ainsi s’établir là-bas évite les contraintes que présente la vie en Occident. Il suffit de considérer certains des éléments haram (interdits) que les réfugiés musulmans éviteraient en vivant en Arabie :

·      Les chiens de compagnie (on en compte 61 millions rien qu’aux États-Unis).
·      Une cuisine où le porc abonde et une vie sociale où l’alcool coule à flots.
·      Des loteries sponsorisées par l’État et des temples de style Las Vegas dédiés au jeu.
·      Des femmes aux tenues indécentes, la danse, les concours de beauté en maillot de bain, les femmes célibataires vivant seules, se baignant et ayant des rendez-vous avec des hommes, et la prostitution légale.
·      Les bars lesbiens, les parades homosexuelles et le mariage gay.
·      Une attitude laxiste face aux substances hallucinogènes avec dans certains systèmes juridiques une légalisation des drogues.
·      Des romans blasphématoires, des personnalités politiques opposées au Coran, des organisations de musulmans apostats et un pasteur qui à plusieurs reprises et publiquement brûle des exemplaires du Coran.

----------
En Arabie saoudite, aucun risque de se retrouver au milieu d’une Gay Pride comme celle-ci.
----------

Au lieu de tout cela, les musulmans vivant en Arabie peuvent se réjouir d’un code de lois qui (contrairement à l’Irlande) permet la polygamie et (contrairement à la Grande-Bretagne) autorise le mariage des enfants. Contrairement à la France, l’Arabie considère comme défendable le fait pour un homme de battre sa femme et se montre conciliante au sujet de la mutilation génitale des femmes. Contrairement aux États-Unis, la pratique de l’esclavage ne conduit pas à la prison et les hommes qui commettent un crime d’honneur sur les femmes de leur famille ne doivent pas craindre la peine de mort.

----------
Vue d’une rue à Riyadh, présentant les charmes de la vie urbaine en Arabie saoudite.
----------

L’exemple des Syriens et de l’Arabie s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large : indépendamment de leur nombre, les réfugiés devraient être acceptés et encouragés à rester dans leur propre aire culturelle, là où ils sont susceptibles de s’intégrer le plus aisément, de garder le plus fidèlement leurs traditions, de causer le moins de perturbations au sein de la société d’accueil et d’où ils pourraient retourner chez eux le plus facilement. Ainsi les gens d’Asie du Sud-Est devraient se réfugier d’une façon générale en Asie du Sud-Est, les gens du Moyen-Orient au Moyen-Orient, les Africains en Afrique et les Occidentaux en Occident.

Conseil à l’ONU : concentrez-vous moins sur l’Occident et davantage sur le reste du monde. Conseil également aux Saoudiens : il est temps d’accueillir à bras ouverts des coreligionnaires musulmans opprimés.

24 septembre 2013, addenda :

(1) Je suis parfaitement conscient que les Saoudiens et les autres n’ont aucunement l’intention d’accueillir des réfugiés, que ceux-ci soient syriens ou autres ; c’est la prémisse implicite de mon analyse. Pourquoi faudrait-il les récompenser pour un mauvais comportement ? Je suis également conscient que les réfugiés syriens ont été maltraités dans les pays du Moyen-Orient. En Égypte, par exemple, ils sont devenus le bouc émissaire tout trouvé.

(2) Ces vastes aires culturelles sont provisoires. Leurs frontières devraient être délimitées.

(3) Il existe des exceptions à ces aires culturelles. Les chrétiens du Moyen-Orient, par exemple, ont davantage leur place en Occident qu’en Arabie et des personnes exceptionnelles méritent toujours une considération particulière.

(4) Certains réfugiés économiques du Moyen-Orient ont découvert la Chine et ils sont de plus en plus nombreux à se rendre là-bas munis d’autorisations de séjour valables de un à cinq ans.

vendredi 20 septembre 2013

Accord sur la Syrie


L’accord sur la Syrie : pertes et profits
Avantage de Poutine, Assad et l’Iran sur Obama, la Turquie et Israël

par Daniel Pipes
National Review Online
17 septembre 2013

Version originale anglaise : Scoring the Syria Deal
Traduction française : Johan Bourlard

La diplomatie n’a jamais connu une suite d’événements aussi vertigineuse et changeante que celle à propos de la Syrie, qui a débuté le mercredi 21 août et s’est achevée trois semaines et demie plus tard, le samedi 14 septembre. Même s’il est trop tôt pour départager les gagnants et les perdants, on voit que Bachar al-Assad mène le jeu, ce qui laisse penser que lui, Poutine et les mollahs sortiront gagnants alors qu’Obama, Erdoğan et Israël seront les perdants.

Commençons par revenir sur les derniers événements :

21 août. Une attaque à l’arme chimique contre des civils se produit à Ghouta, près de Damas. Elle est apparemment l’œuvre du régime d’Assad.

28 août. Barack Obama signale son intention de faire usage de la force contre le régime d’Assad pour le punir d’avoir perpétré l’attaque chimique.

31 août. Obama fait marche arrière et demande au Congrès l’autorisation d’utiliser la force, une chose qu’il n’était pas obligé de faire.

Au cours de la semaine suivante, l’opposition aux frappes, tant au sein du Congrès que parmi la population, enfle à tel point qu’il devient évident qu’Obama n’obtiendra pas l’autorisation espérée.

9 septembre. Le secrétaire d’État John Kerry promet une attaque « incroyablement réduite » et a ajouté de façon cavalière que le contrôle international de l’armement chimique syrien pourrait écarter la nécessité d’une attaque. Une idée que les Russes se sont empressés de reprendre et d’exploiter.

10 septembre. Obama renonce à sa menace d’attaquer le régime syrien et retire la demande qu’il a faite au Congrès.

14 septembre. Les gouvernements russe et américain signent un accord établissant un « plan de démantèlement des armes chimiques syriennes » destiné à « garantir la destruction du programme d’armement chimique syrien de la façon la plus rapide et la plus sûre possible. »

Commençons par évaluer les choix auxquels ont été confrontés les deux principaux acteurs de ce drame :

Bachar al-Assad. Le plan de démantèlement lui permet de placer les décisions clés du processus sous l’influence de ses protecteurs (Moscou et Téhéran) et de ses conseillers (le clan Assad). Une alternative s’offre à lui : respecter ou non l’accord russo-américain et les exigences de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en charge du contrôle du traité sur les armes chimiques que la Syrie a promis de signer. Assad étant un dirigeant incompétent sur le plan tactique, ses actions sont difficiles à prévoir mais je m’attends à ce qu’il ne respecte pas l’accord pour les raisons suivantes : (1) Il a besoin de ces armes pour préserver son régime. (2) La guerre civile qui déchire actuellement la Syrie favorise le court-circuitage de l’OIAC. (3) L’attitude d’Obama suggère qu’il n’organisera pas de représailles. (4) Saddam Hussein a constitué un précédent intéressant en ce sens que, dans les années 1990, le jeu irakien du chat et de la souris a ralenti et fait obstacle au démantèlement d’armes de destruction massive par un régime similaire.

Barack Obama. Déjà sur la brèche en août 2012 avec sa menace au sujet de la « ligne rouge », le président américain se retrouve, avec le coup de poker que constitue l’accord russo-américain, à la merci de son homologue syrien. Si Assad respecte l’accord, Obama deviendra un génie de la politique étrangère pour avoir débarrassé la Syrie de son armement chimique sans coup férir. Mais si Assad ne respecte pas l’accord, ce qui est bien plus probable, Obama devra attaquer le régime pour préserver sa crédibilité en dépit de ce que cela pourra coûter et malgré les souhaits de sa base de gauche, de l’opinion du Congrès, des Nations unies, du pape, et d’autres encore, et même si cela renforce les djihadistes en Syrie et implique les États-Unis dans des opérations militaires indésirables de longue haleine. Pour ma part je pense qu’Obama passera à l’offensive mais sans causer de réels dommages tant à sa popularité qu’au régime d’Assad.

Bref je prédis qu’Assad ne respectera pas l’accord et qu’Obama mènera une attaque symbolique. Selon ce scénario, cela signifie pour les acteurs principaux :

·      Bachar al-Assad. Il pourra pérorer au sujet de sa survie à une offensive américaine et dans ce registre, il est le plus fort.
·      Barack Obama. La crédibilité de sa politique étrangère sombrera et celle des États-Unis également – surtout par rapport au dossier nucléaire iranien – à tout le moins jusqu’en 2017.
·      Vladimir Poutine. Qu’Assad se conforme ou non aux termes de l’accord, et qu’Obama passe ou non à l’offensive, le président russe ne peut pas perdre. Au contraire, il est entré en lice pour le Prix Nobel de la Paix. Il est le grand vainqueur.
·      L’Iran. Téhéran en sortira gagnant, avec la certitude que son infrastructure nucléaire échappera aux frappes américaines même si Obama met le régime d’Assad en pièces.
·      Recep Tayyip Erdoğan. Le Premier ministre turc, en tant que leader international des partisans de la guerre, sera perdant même si Obama attaque sérieusement Assad.
·      Israël. Avec Obama, le pays sortira gagnant si Assad respecte l’accord et perdant dans le cas contraire, ce qui est probable.

Terminons par deux observations ironiques. Au lieu de résoudre la crise, l’accord russo-américain la prolonge et l’aggrave. Par ailleurs, le discours prononcé presque nonchalamment il y a un an par Obama à propos de la « ligne rouge » fut l’erreur insignifiante qui pourrait précipiter le grand fiasco diplomatique de sa présidence.

samedi 14 septembre 2013

Oubliez la Syrie, ciblez l'Iran

Ma traduction de l'article de Daniel Pipes, publié le 9 septembre 2013:

Voici quelques conseils aux membres du Congrès américain à qui on demande de soutenir une attaque conduite par les États-Unis contre le gouvernement syrien :
Commencez à réfléchir en établissant des priorités, et en mettant au clair ce qui importe le plus pour le pays. L'administration Obama souligne à juste titre deux priorités urgentes : l'arrêt du programme nucléaire iranien et le maintien de la sécurité d'Israël. À cela, j'ajoute une troisième priorité : le rétablissement de la crédibilité de dissuasion américaine, minée par Barack Obama lui-même.

jeudi 12 septembre 2013

Le fiasco de la diplomatie d'Obama


Ma traduction de l'article de Daniel Pipes, publié le 21 août 2013:

C'est un privilège d'être un Américain travaillant dans le domaine de la politique étrangère, comme je le fais depuis la fin des années 70, en participant modestement au grand projet qui consiste à placer mon pays sur l'échiquier mondial. Mais à présent, sous la présidence de Barack Obama, les décisions prises à Washington ont nettement diminué en importance. C'est inquiétant, consternant et ce qui était un privilège ne l'est plus. (Lire la suite)

Censure pour racisme

Pourquoi Enoch Powell fut-il censuré pour racisme et pas Charles de Gaulle ?


Ma traduction de l'article de Daniel Pipes, publié le 19 août 2013:

Sur le plan historique, les empires français et britannique étaient fondés sur des principes différents : alors que le premier (dans la tradition romaine) se concentrait davantage sur la culture, le second privilégiait la race, la hiérarchie et la famille. Cette différence s'est traduite de plusieurs façons : on peut ainsi manger un bifteck frites dans de toute petites villes de l'ancienne colonie du Niger mais peu de nourriture anglaise par contre dans les villes du Nigéria voisin. Le Sénégalais Léopold Senghor est devenu un grand poète et une grande figure de la culture française alors que le Bengalais Rabindranath Tagore n'a jamais pu transcender ses origines indiennes. (Lire la suite)

L'islamisme probablement condamné à disparaître


Ma traduction de l'article de Daniel Pipes, publié le 22 juillet 2013:
Pas plus tard qu'en 2012, les islamistes semblaient pouvoir coopérer en surmontant leurs nombreuses dissensions internes – religieuses (sunnites et chiites), politiques (monarchistes et républicains), tactiques (politiques et violentes), ou encore sur l'attitude face à la modernité (salafistes et Frères musulmans). En Tunisie, par exemple, les salafistes et les Frères musulmans (FM) ont trouvé un terrain d'entente. Les différences entre tous ces groupes étaient réelles mais secondaires car, comme je le disais alors, « tous les islamistes poussent dans la même direction, vers l'application pleine et sévère de la loi islamique (la charia) ». (Lire la suite)

Mon article "Coran et racisme"


Dictionnaire historique et critique du racisme, publié sous la direction de Pierre-André Taguieff aux Presses universitaires de France (PUF), 2013.


Cet ouvrage de plus de 2000 pages auquel ont collaboré 250 auteurs, "fournit les éclairages historiques et conceptuels sur tous les débats et controverses autour des attitudes et des comportements qui structurent l’espace du racisme". Parmi les 540 articles que compte ce nouvel ouvrage de référence, on trouvera mon article "Coran et racisme" (p. 384-386).