samedi 13 septembre 2014

Qui observe les observateurs ?

Par Steven Emerson
Special to IPT News
16 août 2014

Version originale anglaise : Who watches the watchers ?
Traduction française : Johan Bourlard

Le spectacle médiatique offert par la couverture du conflit entre Israël et Gaza demeure le seul domaine d’investigation dont nous ayons vraiment besoin.

Comme toujours quand il s’agit d’Israël, de nombreuses organisations – représentant les Nations unies, La Haye, l’Union européenne, des groupes de défense des droits de l’homme, des ONG – ont annoncé, au début de la semaine dernière, leur intention « d’enquêter et de passer en revue » les opérations militaires entreprises par Israël et le Hamas au cours de ces cinq dernières semaines afin de déterminer si des « crimes de guerre » ont été commis.

L’histoire récente nous a montré à maintes reprises avec quelle virulence pratiquement toutes ces organisations ont manifesté leurs penchants anti-israéliens (pour ne pas dire parfois antisémites) vociférant contre Israël, accusé de crimes de guerres, et répétant ainsi pour la énième fois l’accusation selon laquelle Israël serait coupable de tous les maux, que ce soient des crimes de guerre, des violations massives des droits humains ou encore de génocide.

Aucun autre pays au monde – pas même le Soudan, la Corée du Nord et l’Iran qui ont commis de véritables violations massives des droits humains – n’a jamais été l’objet d’un flot de condamnations comparable à celui qu’a subi spécifiquement Israël. Et même si les actions du Hamas sont officiellement inscrites à l’ordre du jour des investigations de ces organismes, on sait que cela n’est que de la poudre aux yeux destinée à couvrir leurs investigations d’un vernis d’impartialité.

Hier, l’ONU a annoncé que près de 2000 civils ont été tués, rien que ces deux derniers jours, dans le conflit qui oppose l’Ukraine aux séparatistes pro-Russes dans l’est du pays. Deux mille en deux jours ? En cinq semaines, 1957 morts sont tombés à Gaza, dont la plupart étaient de véritables terroristes et non des civils comme l’ont laissé croire perfidement les grands médias et les agences de l’ONU. Il ne faut toutefois pas s’attendre à un déluge d’investigations de la part de l’ONU ou des groupes de défense des droits de l’homme. Quant aux médias internationaux ils ont été, comme on pouvait s’y attendre, aux abonnés absents lors de la couverture des événements en Ukraine qui ont fait 2000 morts.

Et pour cause : la prestation médiatique qu’a été la couverture du conflit entre Israël et Gaza demeure le seul domaine d’investigation dont nous ayons vraiment besoin. Et si la vérité doit être dite, pourquoi les médias devraient-ils craindre que cette prestation soit soumise à la critique ? Après tout, le journalisme est une profession qui proclame sa supériorité morale, qui affirme rechercher uniquement « la vérité », qui prétend être la seule institution dans une société libre capable de faire rendre compte des actions du gouvernement – d’où le sobriquet de « quatrième pouvoir » donné aux médias – et qui stigmatise la moindre critique de ses prestations comme une atteinte à la « liberté d’expression ».

Mais qui donc observe les observateurs ?

En fait, personne. Pourtant les médias prétendent volontiers exercer un contrôle sur eux-mêmes, affirmant que tout contrôle externe constituerait une violation du droit fondamental qu’est la liberté d’expression. Ainsi de temps en temps, mais c’est tellement rare, nous pouvons voir les médias reconnaître leurs erreurs et leurs approximations dans leur travail d’information. Toutefois, d’une façon générale, ces aveux ne sont pas inspirés par les pontes des grands médias mais bien par les « petits » médias situés hors du cercle des initiés, par des observateurs et des critiques extérieurs qui ont pris les médias la main dans le sac et par des journalistes vraiment intègres, et ils sont rares, repoussés et raillés par les grands médias. Il suffit de penser aux journalistes Bernard Goldberg et Sharyl Attkisson, lâchement dénigrés et attaqués par les grands médias après avoir eu le culot – en fait l’honnêteté – de critiquer la prestation de leurs propres coreligionnaires.

La question qui se pose dans le cas présent est de savoir de quelle honnêteté et de quelle rigueur les grands médias ont fait preuve dans le traitement du conflit entre Israël et Gaza et plus particulièrement quelle a été l’honnêteté, l’impartialité et la précision des grands médias – comme le Washington Post, la National Public Radio, le New York Times et CNN – dans la couverture des actions du Hamas à Gaza, de ses violations des droits de l’homme et de ses atrocités ainsi que des menaces qu’il a adressées à des journalistes. Nous savons tous très bien comment ils ont couvert les actions d’Israël à Gaza. La couverture des morts et des dégâts à Gaza était assurée à la fois par la presse écrite et parlée souvent sans fournir d’explication critique disant qu’Israël avait pour cibles les sites de lancement de missiles du Hamas, ses quartiers généraux et ses sites militaires – tous nichés dans les centres urbains de la Bande de Gaza, dans des écoles, des hôpitaux ou des antennes de l’ONU.

Dans la couverture des événements réalisée par les médias en question, il n’y a pas eu la moindre photo d’un terroriste du Hamas, pas la moindre photo d’un site du Hamas niché au cœur d’une zone d’habitations, dans une école de l’ONU, un hôpital, un immeuble d’appartements, un jardin d’enfants. Pas le moindre reportage ni la moindre photo des exécutions de dissidents palestiniens par le Hamas. Et pas un seul reportage sur les menaces et actions de harcèlement palestiniennes exercées sur les journalistes suspectés par le Hamas de montrer ces réalités. Ce fut dès lors une agréable surprise de voir la semaine dernière la Foreign Press Association (FPA), une organisation de 480 journalistes couvrant Israël, la Cisjordanie et Gaza, se fendre d’une déclaration pour condamner les menaces et les intimidations exercées par le Hamas sur les journalistes.

Sachant qu’il émane de la FPA, connue davantage pour son antipathie à l’égard d’Israël que pour ses critiques envers le Hamas, le texte de la déclaration mérite d’être reproduit :

« La FPA s’élève de la façon la plus énergique contre le recours manifeste, systématique et peu orthodoxe à la force par les autorités du Hamas et par leurs représentants contre les journalistes internationaux présents à Gaza le mois dernier. Les médias internationaux ne sont pas des organismes militants et ne peuvent être empêchés d’informer par des moyens de pression comme des menaces, qui priveraient leurs lecteurs et leurs téléspectateurs d’une image objective du terrain. À plusieurs reprises, des reporters étrangers travaillant à Gaza ont été harcelés, menacés ou interrogés à propos des reportages et des informations qu’ils diffusent au travers de leurs médias d’information ou des médias sociaux. Nous sommes également conscients que le Hamas tente d’engager un processus « minutieux » visant concrètement à l’établissement d’une liste noire de journalistes. La FPA s’oppose avec force à ce processus. »

Voilà une déclaration vraiment extraordinaire. Mais les grands médias américains ont-ils relayé ce mea culpa ? Aucun d’entre eux n’en a soufflé le moindre mot. Aucun.

Pire. Certains journalistes comme Jodi Rudoren, chef du bureau du New York Times en Israël, ont ignoré royalement la déclaration de la FPA. Dans un message reproduit sur le blog CAMERA, un observatoire des médias, la réponse de Rudoren à la déclaration de la FPA fut à la fois courte et claire : « Tous les reporters que j’ai rencontrés et qui étaient à Gaza disent que le discours israélien tenu à présent par la FPA à propos du harcèlement du Hamas est un non sens. »

Le blog CAMERA cite ensuite les témoignages de nombreux journalistes qui, à leur retour de Gaza, disent la façon dont ils ont été menacés, intimidés et manipulés par le Hamas.

Mais, selon Rudoren, tout cela fait certainement partie d’une histoire montée de toutes pièces par les sionistes, à l’instar des reportages sur les attaques massives que le Hamas projetait de lancer depuis les tunnels en période de grandes fêtes juives, dans le but de tuer des dizaines de milliers de civils israéliens. Or dans la série de plus de 800 reportages publiés dans le New York Times durant ces cinq semaines de guerre, le quotidien n’a jamais eu un mot à ce sujet. Pourquoi ? Selon un e-mail de Rudoren que j’ai pu obtenir, celle-ci affirme avoir parlé à un responsable de l’armée israélienne qui a qualifié les projets d’attaques par le Hamas de « complètement faux », de « rumeur dénuée de preuve ».

Lorsque j’ai interrogé Peter Lerner, porte-parole de Tsahal, au sujet de ce complot, il m’a répondu : « le renseignement de l’armée israélienne a confirmé sans l’ombre d’un doute que le Hamas avait planifié une attaque par les tunnels dans le but de tuer des milliers de civils israéliens. » Pratiquement tous les médias israéliens – même Ha’aretz connu pour ses opinions très à gauche – ont parlé de ce projet de massacre fomenté par le Hamas. Un projet qui sera resté inaperçu pour les lecteurs du New York Times, en raison des impératifs idéologiques manifestement pernicieux du chef du bureau du journal en Israël.

Rudoren était interviewée le 30 juillet dans une émission de la CNN par Hala Gorani qui, par les questions qu’elle posait à Rudoren, a exposé sans fard les tendances anti-israéliennes de la chaîne : « Jodi, nous venons de montrer à nos téléspectateurs ces images diffusées par les réseaux internationaux et qui montrent la destruction complète et le désastre humanitaire qui règnent à Gaza. Les Israéliens ont-ils accès à ces images dans leur propre pays ? »

Réponse de Rudoren : « Pas énormément. Je veux dire, certaines sûrement. Mais d’une certaine manière, il faut aller les dénicher. Quelqu’un m’a dit qu’ils regardaient Al Jazeera pour avoir également l’autre son de cloche. »

En fait, comme tous ceux qui regardent la télé israélienne ont pu s’en rendre compte, les dommages causés par Tsahal à Gaza ont été largement diffusés et commentés. Les propos de Rudoren concernant les Israéliens et Al Jazeera sont tout simplement une invention. Mais pour CNN, on ne pouvait pas croire que les Israéliens ne désavoueraient pas leur gouvernement qui les a protégés contre les pluies de roquettes et les dizaines de tunnels creusés en direction d’Israël pour y lancer des attaques meurtrières de masse. Contrairement à CNN, la télévision israélienne a également montré la façon dont le Hamas a stocké des munitions et lancé des missiles à partir de mosquées, d’hôpitaux, d’écoles et d’installations onusiennes. La télé israélienne a montré aussi des photos des installations de contrôle et de commande du Hamas à l’hôpital d’Al-Shifa ainsi que les photos des sites de stockage des munitions et des missiles situés au cœur des zones civiles.

Dans une autre émission de CNN diffusée le 3 août 2014, l’animateur Brian Stelter reconnaissait que des téléspectateurs s’étaient plaints du fait que la chaîne s’abstenait délibérément de montrer des images de terroristes du Hamas ou de leur façon d’opérer à partir de zones civiles.

Stelter : « À Gaza, le Hamas exerce-t-il des pressions sur les journalistes et cherche-t-il à les intimider pour qu’ils ne montrent que des civils et non ceux qu’Israël appelle terroristes ? »

Eh bien j’ai posé la question au responsable du département international de CNN, Tony Maddox, et il m’a répondu non. »

Nous publions ici son commentaire : « Nos journalistes sur le terrain ont dit à plusieurs reprises qu’on trouve rarement des militants du Hamas dans les rues de Gaza. Nous n’avons reçu aucune intimidation du Hamas ni reçu aucune menace concernant nos reportages. Jusqu’à présent, ils ont refusé toutes nos demandes d’interview à Gaza. »

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