mercredi 23 mars 2016

Attentats de Bruxelles : il n’y a pas de fatalité

Par Johan Bourlard
Historien et islamologue
23 mars 2016

Au lendemain des attentats ignobles qui ont frappé Bruxelles, ce mardi 22 mars 2016, l’heure est bien entendu au recueillement et aux hommages aux victimes et à leurs proches. Toutefois si ces attaques sont choquantes, elles n’ont rien d’étonnant.

Les attentats de Bruxelles étaient en effet prévisibles. Depuis des semaines voire des mois, on savait qu’une attaque terroriste se produirait dans la capitale belge et européenne. La question que beaucoup se posaient depuis un certain temps déjà n’était pas de savoir si mais quand et où les attentats auraient lieu.

Cette attitude résignée est de mise chez nombre de nos dirigeants qui affirment, telle une réalité inéluctable, que nous devrons désormais apprendre à vivre avec le terrorisme ! Mais comment peut-on se résigner face à de telles horreurs, surtout quand celles-ci sont évitables, car il n’y a pas de fatalité. Si les causes du terrorisme islamiste sont multiples, on peut néanmoins en dégager deux sur lesquelles les gouvernements occidentaux sont en mesure d’agir directement.

L’une des racines de ce terrorisme est à trouver dans le financement et l’idéologie mortifère qui le nourrissent. On sait le rôle joué par certaines monarchies du Golfe dans le financement du djihadisme et dans la diffusion d’un islam des plus rigoristes et intolérants à travers un réseau de mosquées et de centres islamiques que ces monarchies construisent et entretiennent en Occident. On pense notamment à l’Arabie saoudite qui, par l’intermédiaire de la Ligue islamique mondiale qu’elle a créée et qu’elle finance, répand sa vision d’un islam traditionnel en flagrante contradiction avec les standards d’une société démocratique du XXIe siècle.

Une autre racine du terrorisme est à chercher dans la frustration causée au sein des peuples musulmans par les interventions à répétition d’armées occidentales en terre d’Islam. Depuis l’intervention de l’armée américaine en Afghanistan en 1979 en vue de contrer l’invasion du pays par l’Union soviétique, les États-Unis et leur allié docile qu’est l’Union européenne sont régulièrement intervenus dans des pays de culture musulmane avec pour résultat une situation souvent pire que l’état initial : une fois chassé le dictateur au pouvoir, ce n’est pas la démocratie tant rêvée – par les Occidentaux – qui s’installe mais un nouveau régime encore plus répressif que le précédent voire, dans le pire des cas, le chaos.

Pour agir sur ces deux causes – idéologie et frustration – et porter ainsi un coup fatal ou du moins très important au terrorisme djihadiste, nos gouvernements doivent d’une part, revoir leurs alliances avec les monarchies pétrolières du Golfe qui financent – directement ou indirectement – le terrorisme et l’islam rigoriste, et d’autre part, faire respecter les principes démocratiques dans les pays dont nos gouvernements ont la responsabilité – c’est-à-dire ici, en Occident – et non tenter d’imposer, telle une nouvelle forme d’impérialisme ou de colonialisme, la démocratie dans des pays dont la culture et l’histoire diffèrent sensiblement de celles des démocraties occidentales.


Bien entendu, il y a un préalable à la prise de ce genre de mesures, à savoir le changement d’état d’esprit des dirigeants occidentaux. Il faut en effet cesser de toute urgence de privilégier les considérations économiques au détriment de nos valeurs fondamentales. C’est le prix à payer si nous ne voulons pas voir le terrorisme djihadiste continuer à prospérer au détriment de nos libertés.

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