lundi 1 décembre 2014

Le CAIR, association islamiste américaine fichée comme terroriste par les Émirats, récompense un dirigeant du Djihad islamique palestinien


IPT News
20 novembre 2014

Traduction française : Johan Bourlard

Des responsables du Council on American-Islamic Relations (CAIR) ont exprimé leur étonnement et leur embarras face à la décision prise par les Émirats arabes unis de faire figurer l’organisation islamiste américaine sur une liste d’organisations terroristes.

« Eh bien, nous sommes tout d’abord choqués », a dit sur CNN mardi le cofondateur et directeur exécutif du CAIR Nihad Awad. « C’est une attitude curieuse de la part des Émirats et c’est pourquoi nous tentons d’obtenir des éclaircissements par rapport à cette décision, non seulement nous, le CAIR, mais aussi d’autres organisations civiles musulmanes dont la Muslim American Society et la plus grande organisation d’aide aux musulmans en Occident. C’est à la fois inquiétant et choquant de voir qu’un État comme les Émirats arabes unis pointe une organisation américaine de défense des droits civils comme le CAIR. »

La liste des groupes terroristes a été révélée samedi par Buzzfeed, qui a cité l’annonce faite dans les médias officiels des Émirats.

Une semaine plus tôt, le CAIR organisait en Californie un banquet pour la remise de son prix pour la « Promotion de la Justice » à Sami Al-Arian et sa famille. Dans les années 1990, Al-Arian siégeait à la choura du Djihad islamique palestinien – le conseil d’administration – et a donné asile à au moins trois autres membres de ce conseil aux États-Unis dont l’actuel secrétaire général du Djihad, Ramadan Shallah.

En 1991, lors d’un discours prononcé à Cleveland, Al-Arian avait été présenté comme le chef d’une association caritative appelée l’Islamic Committee for Palestine [Comité islamique pour la Palestine]. L’imam Fawaz Damra a expliqué à l’assistance : « Une brève explication à propos du Comité islamique pour la Palestine : il s’agit de la branche active du mouvement du Djihad islamique en Palestine. Nous avons préféré l’appeler Comité islamique pour la Palestine pour des raisons de sécurité. »
Au cours d’une session ultérieure consacrée à la collecte de fonds, Damra a prié instamment l’assistance de donner au Djihad islamique, en évoquant un attentat qui venait d’être commis par l’un de ses membres. Damra a ajouté : « Celui qui souhaite faire un chèque peut le faire à l’ordre du Comité islamique pour la Palestine ou ICP en abrégé. »

Quatre ans plus tard, au lendemain d’un double attentat suicide en Israël qui avait coûté la vie à 21 Israéliens, Al-Arian a envoyé une lettre à un législateur koweitien en quête d’argent « pour mener le djihad en Palestine de façon à ce que des opérations comme celle-là se poursuivent… »

Al-Arian a prétendu que la lettre n’avait jamais été envoyée. Toutefois, une copie de cette lettre, écrite à la main en arabe et signée, avait été retrouvée à son domicile par les agents fédéraux américains lors d’une perquisition menée en novembre 1995.

En 2006, lors d’une audience de fixation de peine d’un tribunal de district américain, le juge James Moody s’est adressé à Al-Arian en ces termes : « Dans cette affaire, il apparaît clairement que vous étiez un dirigeant du Djihad islamique palestinien. Vous faisiez partie de son conseil d’administration dont vous étiez aussi le secrétaire. Les administrateurs contrôlent les activités d’une organisation même quand il s’agit du Djihad islamique dont vous étiez d’ailleurs un dirigeant actif. »

Al-Arian a plaidé coupable, reconnaissant avoir comploté pour fournir des biens ou des services au Djihad islamique. L’accord qu’il a alors passé avec la justice comportait un aveu de sa part concernant son implication dans le Djihad islamique palestinien. Toutefois, il n’a jamais reconnu l’ampleur de cette implication et n’a certainement jamais désavoué les statuts de l’organisation, retrouvés chez lui et indiquant : « Le rejet de toute solution pacifique pour la cause palestinienne et l’affirmation du djihad comme solution et de la voie du martyre comme seule option pour la libération. »

Les statuts mentionnent l’objectif de créer « un état de terreur, d’instabilité et de panique dans l’âme des sionistes et surtout dans celles des groupes de colons, qui les force à abandonner leurs foyers. »

Les responsables du CAIR savent toutes ces choses mais cela ne les empêche pas de soutenir Al-Arian depuis bientôt vingt ans. Ils savent également que l’accord qu’il a passé avec la justice mentionne son acceptation d’être expulsé.

Le 8 novembre, au moment de la remise du prix, Maleeha Haq, vice-président du CAIR à San Francisco, expliquait que « le choix s’était porté tout naturellement sur la famille Al-Arian. Depuis plus de 11 ans, ils sont au centre d’une campagne injuste dirigée par le gouvernement. Alhamdulillah, le gouvernement a finalement décidé d’abandonner toutes les charges infondées contre Sami Al-Arian. Cependant il demeure dans l’incertitude quant à la procédure d’expulsion. »

Al-Arian a remercié le CAIR pour le prix et incité l’assistance à lutter contre les coups montés de la police et de la justice qui, selon lui, s’en prennent injustement aux musulmans.

Dans un message vidéo, Al-Arian a déclaré : « Mais la seule chose que nous puissions faire pour arrêter ça… c’est d’organiser une campagne publique en vue de changer le gouvernement. Frères et Sœurs, nos jeunes hommes ne devraient pas être sacrifiés sur l’autel de l’islamophobie ou d’une prétendue guerre contre le terrorisme. Les nôtres ne devraient pas être visés en raison de leurs convictions ou de leur participation à des associations. Nous devons dire non au délit d’opinion, non aux poursuites préventives… Ce problème est ignoré par notre communauté depuis trop longtemps. C’est un défi que nous devons relever. Frères et Sœurs, Mesdames et Messieurs, si vous ne le faites pas, qui le fera ? et si pas maintenant, quand alors ? »

Lors du banquet qui s’est tenu au Santa Clara Convention Center, Awad, directeur exécutif national du CAIR, a également pris la parole. Malgré des données solides du FBI montrant que le nombre de crimes motivés par la haine antimusulmane demeure relativement stable et bien moins problématique que les crimes visant les juifs, les noirs et les homosexuels, Awad a lancé un avertissement terrible à l’assistance.

« L’islamophobie constitue une crise nationale pour la communauté musulmane », a-t-il dit. « L’islamophobie constitue une menace pour l’existence, présente et future, de l’islam et pour la liberté de culte des musulmans dans ce pays. »

La qualification de terroriste opérée par les Émirats, pays musulman, ne devrait pas être annoncée avant une semaine. Elle serait due aux liens que le CAIR entretient avec les Frères Musulmans égyptiens. Mardi, lors d’une apparition télévisée sur CNN, Awad a qualifié ces allégations de fantaisistes.

« Nous n’avons jamais été liés aux Frères Musulmans », a-t-il insisté. « Nous n’en sommes pas. Nous sommes un organisme américain indépendant et ces gouvernements ne devraient pas prendre la culpabilité par association pour argent comptant.

Des documents internes aux Frères Musulmans rapportent une tout autre histoire. Ils montrent qu’Awad, à titre individuel, et le CAIR, en tant qu’organisation, font partie d’un réseau de soutien au Hamas créé aux États-Unis par la Confrérie sous le nom de Palestine Committee.

En 1993, Awad a participé à une séance secrète du Palestine Committee. D’ordre stratégique, cette réunion était destinée à définir les manières de « faire dérailler » l’initiative de paix d’Oslo que venait d’obtenir la médiation américaine, tout en évitant d’apparaître comme le soutien du Hamas. Awad a même fait référence au Hamas sous le nom de code indiqué par les organisateurs, à savoir le nom du Hamas lu à l’envers « Samah ».

En 2008, ces liens ont suffi au FBI pour rompre tout contact avec le CAIR. Un juge fédéral a statué qu’il existait « des preuves manifestes pour établir » un lien entre le CAIR et la branche palestinienne des Frères Musulmans qu’est le Hamas.

Lors du banquet, Awad a reconnu les contributions apportées au CAIR par le cofondateur et ancien président national Omar Ahmad qu’un agent du FBI a décrit comme étant « un dirigeant au sein du Palestine Committee ».

La qualification de terroriste opérée par les Émirats ne signifie pas pour autant que le CAIR participe à la préparation d’attentats. Mais comme nous l’avons démontré à plusieurs reprises, le CAIR ne voit aucune objection à soutenir ceux qui favorisent le terrorisme au moyen du financement, de la propagande et de bien d’autres moyens. Les gens aiment Al-Arian, les membres de la direction de la Holy Land Foundation [NdT Fondation pour la Terre sainte] ou encore la Palestinienne Rasmieh Odeh, inculpée pour attentats à la bombe.

En récompensant le directeur du Djihad islamique palestinien peu avant d’être épinglé par les Émirats comme organisation terroriste, le CAIR ne fait rien pour crédibiliser les plaintes selon lesquelles il serait injustement sali.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire