lundi 15 décembre 2014

Un prince arabe dénonce l’islamisme


par Daniel Pipes
The Washington Times
10 décembre 2014

Version originale anglaise : An Arab Prince Denounces Islamism
Traduction française : Johan Bourlard

Le 5 décembre, dans une allocution remarquable mais jusqu’ici passée inaperçue, Salman bin Hamad Al-Khalifa, le prince héritier du Bahreïn (royaume insulaire du golfe Persique abritant la cinquième flotte de la US Navy), a donné une franche analyse de l’ennemi islamiste et proposé des solutions importantes pour le combattre. 
 
Il a beaucoup à nous apprendre, à nous Occidentaux (en commençant par son malheureux homologue britannique, le prince héritier Charles), si seulement nous voulions écouter. Il est vrai que certains dirigeants occidentaux parlent de confrontation avec l’idéologie islamiste, mais la majorité d’entre eux évite d’utiliser ce terme en recourant aux euphémismes, aux confusions et à la lâcheté. Ce qui est le plus frustrant, ce sont ces dirigeants (comme Tony Blair) au discours fort qui ne sont suivis d’aucun acte.

Le prince Salman, âgé de 45 ans et généralement considéré comme le membre de la famille royale bahreïni le plus ouvert aux réformes, commence par observer l’imprécision de l’expression « guerre au terrorisme ». Le temps est venu, dit-il, « de nous débarrasser » d’un terme qui remonte au 11-Septembre. « Il est quelque peu trompeur et ne représente ni l’intégralité ni la totalité du conflit auquel nous sommes confrontés » mais simplement un « outil » et une tactique.

Dans un anglais parfait, le prince poursuit en replaçant le conflit actuel dans son contexte historique : « Reportons-nous au siècle dernier. À l’époque, nous faisions face à un ennemi bien différent. Nous étions confrontés au communisme et nous y faisions face ensemble. Or quand nous étions confrontés au communisme, nous savions qu’il s’agissait d’une idéologie, ce que le terrorisme n’est pas. »

Il observe également que « nous ne sommes pas seulement en train de combattre des terroristes mais également des théocrates. » Par théocrates, Salman entend des hommes « placés au sommet d’une idéologie religieuse et qui ont le pouvoir, par décret religieux, de priver quelqu’un… de leur au-delà – et d’utiliser [le pouvoir religieux] à des fins politiques. » Ce sont également des tyrans, des isolationnistes et des misogynes qu’il faudra combattre « pendant longtemps. » Il les rejette comme des êtres « beaucoup plus proches du XVIIe siècle » et qui n’ont « pas de place dans notre XXIe siècle moderne ». Il nous prie instamment de « supprimer de notre vocabulaire l’expression “guerre au terrorisme” pour nous concentrer sur la menace réelle que constitue l’essor de ces théocraties néfastes » ; à cette fin, il propose de remplacer l’expression « guerre au terrorisme » par sa propre formulation : « guerre aux théocrates ». Il espère que ce concept permettra de « faire converger les programmes militaires, sociaux et politiques – voire économiques – dans une approche globale destinée à contrer ce phénomène comme nous l’avons fait avec le communisme. » Dans la partie peut-être la plus marquante de son discours, il déclare : « C’est l’idéologie en soi qui doit être combattue. Elle doit être nommée, flétrie, endiguée et finalement vaincue. »

Jusque-là, c’est parfait. Toutefois, Salman évite d’aborder cette dure réalité, à savoir que l’idéologie « tordue » et « barbare » qu’il décrit n’est autre qu’islamique et que les théocrates sont tous des musulmans : « cette guerre dans laquelle nous sommes engagés ne peut se faire contre l’islam,… le christianisme,… le judaïsme,… le bouddhisme. » Ainsi, au moment de donner un nom à cette idéologie, Salman hésite et généralise. Il utilise un néologisme inepte (« théo-crism ») avant de rappeler la Seconde Guerre mondiale et la « théocratie fasciste ». Il rejette implicitement « l’islamisme », disant qu’il ne veut pas un « débat au sujet de certains partis politiques pour savoir s’ils sont ou non islamistes. »

Pour ma part, je maintiens que l’islamisme est précisément le terme qu’il cherche pour nommer l’idéologie ennemie et que la guerre dans laquelle nous sommes engagés est bien une « guerre à l’islamisme. » Salman comprend très bien le problème – la transformation de l’islam en une idéologie totalitaire. Mais il se réfugie derrière le prétexte selon lequel le christianisme, le judaïsme et le bouddhisme partageraient tous cette même tare. Et cela au lieu de reconnaître – lui et d’autres musulmans sincères – la réalité inéluctable à savoir que l’islam seul possède une propension au totalitarisme.

Sur le plan positif, les observations de Salman s’inscrivent dans une tendance de plus en plus forte parmi les dirigeants politiques musulmans, qui consiste à affronter directement le danger de l’islamisme. Deux exemples récents illustrent cette tendance :

·      Rupture importante sur le plan des idées, le gouvernement voisin des Émirats Arabes Unis a classé dans sa liste de groupements terroristes le Council on American-Islamic Relations (CAIR) et plusieurs autres organismes non-violents en raison de l’engagement de tous ces groupes dans l’incitation, le financement et d’autres activités favorisant le terrorisme.

·      Le gouvernement égyptien a lancé via Interpol un mandat d’arrêt à l’encontre de Yousouf Al-Qaradawi (88 ans), le leader spirituel immensément influent des Frères Musulmans, pour « incitation et aide à commettre un homicide volontaire, à faire s’échapper des prisonniers, à perpétrer des incendies, des actes de vandalisme et de vol. »

Cette nouvelle tendance est d’une importance majeure. Comme je le dis souvent, l’islam radical est le problème et l’islam modéré est la solution. Désormais, on peut ajouter un autre dirigeant influent, en l’occurrence un prince héritier, à la liste des musulmans désireux de trouver une solution.

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