par Yaakov Lappin
Special to IPT
News
13 octobre 2014
Version originale anglaise : Israel
Prepares For When Syrian Jihadis Turn Their Guns South
Traduction française : Johan Bourlard
Si
vous demandez à des responsables de la Défense israélienne le risque que
représentent pour leur pays l’État islamique (EI) et le Front Al-Nosra en
Syrie, attendez-vous à une réponse en deux temps.
Pour
le moment, les responsables estiment que ces éléments radicaux sunnites
djihadistes ne représentent pas une menace immédiate pour les frontières et la
sécurité nationale d’Israël.
Ils
sont en effet trop occupés à combattre l’armée de Bachar al-Assad, les milices
chiites et le Hezbollah qui est intervenu aux côtés d’Assad – sans parler
d’autres groupes rebelles syriens.
À
terme toutefois, les responsables disent que ces organisations constitueront
une réelle menace pour Israël et que la meilleure chose à faire est de s’y
préparer dès maintenant.
Il
y a quelques semaines, un officier supérieur de l’armée déclarait :
« Nous les voyons déployés le long de la frontière israélienne mais nous
ne pensons pas qu’ils soient sur le point de cibler Israël. Je ne vois pas quel
serait l’intérêt du Front Al-Nosra de nous attaquer maintenant. » D’autre
part, Al-Nosra a déclaré que lorsqu’il en aura terminé avec le régime d’Assad
« le tour des Juifs viendra. Et nous nous y préparons, » a fait
remarquer ce même officier.
Chaque
matin, il faut que les Forces de Défense d’Israël observent attentivement la
zone où il fut un temps existait un pays appelé la Syrie, pour se rendre compte
de ce qui a changé. Et la plupart des matins, elles voient que beaucoup de
choses ont changé.
Ces
dernières semaines, par exemple, la branche officielle d’Al-Qaïda en Syrie, le
Front Al-Nosra, a joué un rôle clé dans la prise de la région de Quneitra, non
loin de la frontière entre Israël et le Plateau du Golan. Le commandement nord
de l’armée israélienne voit à présent des drapeaux et des combattants
d’Al-Nosra de l’autre côté de la frontière, là où récemment encore on voyait trôner
les positions militaires d’Assad et flotter les vieux drapeaux syriens.
En
septembre ce sont environ 700 membres du Front Al-Nosra ainsi que 1300 rebelles
issus d’autres organisations qui ont conquis Quneitra, une place que le régime
d’Assad tente depuis lors de reprendre – jusqu’à présent sans succès.
Si
Al-Nosra s’est déplacé vers Quneitra, c’est parce qu’il a été repoussé de la
Syrie orientale (notamment de la région de Deir ez-Zor) par son rival
djihadiste, l’État islamique, qui a proclamé un califat islamique
transnational.
Aujourd’hui
les membres de l’État islamique se situent à environ 50 kilomètres de la
frontière israélienne et à certains endroits ils pourraient finir par se rapprocher
bien plus encore.
Les
planificateurs de l’armée israélienne ne font pas qu’observer la multitude de
batailles qui font rage en Syrie, ils écoutent aussi attentivement les
déclarations des membres d’Al-Nosra disant que leur but est de conquérir
d’abord Damas et ensuite Jérusalem. Ce genre de discours est pris très au
sérieux et incite Israël à se préparer lentement mais sûrement.
Selon
l’opinion dominante au sein de la Défense israélienne, les djihadistes sunnites
finiront par pointer leurs armes vers Israël, c’est juste une question de
temps. En attendant, aussi bien le Front Al-Nosra que l’État islamique, dont
l’objectif idéologique commun est de créer un califat radical, sont en train de
prendre de l’ampleur.
Alors
qu’elles razzient des bases militaires syriennes, s’emparent d’armes et en achètent
d’autres sur le marché noir, ces deux organisations djihadistes acquièrent
toutes sortes d’armes, des plus petites aux lance-missiles portatifs en passant
par les véhicules blindés ou encore des mortiers. Il est possible que dans un futur
proche, les deux groupes soient aussi en mesure de produire leurs propres
armes, telles que des roquettes.
Parmi
les initiatives prises par Israël pour faire face aux djihadistes de Syrie, on
note pour le Plateau du Golan, la mobilisation d’une nouvelle division à
laquelle on donnera la possibilité d’effectuer en seulement quelques minutes le
déploiement d’une puissance aérienne et de frappes d’artillerie.
Dépendant
en grande partie de la surveillance accrue du secteur syrien par les
renseignements israéliens, la nouvelle division s’exerce actuellement à un
potentiel déploiement terrestre rapide en Syrie afin de répondre, si
nécessaire, à des attaques terroristes de tout type, qu’il s’agisse de
projectiles, d’intrusions hostiles ou encore de bombardements aux frontières.
Parmi
les autres initiatives, on relèvera l’achèvement, l’année dernière, de la
barrière de haute technologie le long de la frontière, dotée de toute une série
de capteurs destinés à fournir aux contrôleurs de l’armée des informations sur n’importe
quel mouvement suspect.
Ce
système multi-sensoriel, appelé « Mars en Israël », est utilisé par
le Corps de Collecte de Renseignements de l’armée israélienne. Il envoie toute
une série de signaux à partir de caméras, de radars et d’autres appareils
répartis le long de la frontière.
En
outre, l’armée israélienne voit dans les systèmes de défense aérienne, comme le
Dôme de fer ou la Fronde de David, un moyen capital de protection du nord
d’Israël contre des menaces syriennes potentielles.
Tsahal
est également en mesure d’ordonner à ses corps d’artillerie de lancer des
missiles sol-sol de précision Tamouz, pour des frappes précises contre des
cibles situées en Syrie.
Outre
la puissance militaire, Israël cherche également à adopter une attitude plus conciliante
envers les Syriens vivant près de la frontière. Dans cette optique, environ
1300 Syriens blessés durant la guerre civile ont été soignés dans des hôpitaux
israéliens.
De
telles mesures pourraient quelque peu réduire la menace mais une confrontation
avec les radicaux djihadistes demeure à l’avenir une quasi-certitude.
Un
danger supplémentaire réside dans le fait que la Syrie deviendra probablement un
centre de production du djihad d’où sortiront des terroristes qui essaimeront partout
dans la région.
Cette
évolution pourrait conduire au développement de réseaux djihadistes régionaux s’étendant
de la Péninsule du Sinaï (foyer de groupes liés à Al-Qaïda comme Bayt al-Maqdis)
à l’Irak et à la Syrie où l’État islamique continue à consolider son emprise.
Aujourd’hui,
ces forces s’emploient à combattre leurs ennemis plus près de chez nous mais
demain, leur idéologie les amènera très probablement à affronter le seul État
juif du Moyen-Orient.
Yaakov Lappin est correspondant
au Jerusalem
Post pour les affaires militaires et de
sécurité nationale. Il est l’auteur de The Virtual Caliphate
(Potomac Books), un ouvrage qui explique l’établissement d’un État islamiste
virtuel par les djihadistes agissant sur internet.
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